Il semble qu’il y ait une confusion entre l’observation d’une matière physique et l’observation d’une présence physique. Aborder un objet de l’existence par nos sens, n’en déduit pas forcément que l’on en connaisse sa nature. Si de cette observation nous en déduisons une nature matérielle, c’est parce que nous assimilons inconsciemment la relation à cet objet à une relation antérieure auquel un souvenir nous rattache, par la simple analogie de son comportement dans son contexte d’observation. Ce que nous apporte la conscience de nous-mêmes permet de dénoter, dans l’apparition d’un objet au sein de notre conscience par le médium des sens, une simple présence que manifeste cet objet, qui est due à ses seules propriétés d’existence. Deux explications sont à mettre au compte de cela, la première, c’est que la subordination de notre point de vue à un temps historique nous fait accorder à une réalité individuelle, des conditions d’apparition qui ne peuvent être que contextuelles. La deuxième explication, c’est que nous sommes convaincus que par cette interprétation du temps, nous ne devons notre propre réalité qu’à des conditions qui nous sont extérieures.
Il devient donc évident que l’interprétation de la nature du temps est au centre d’une évaluation possible de nos facultés, et que la limite d’explication d’un temps historique nous confines dans les seules expériences sensibles. Ceci par l’acceptation d’une relation de cause à effet entre l’objet observé et le sujet qui observe. Mais cela n’est pas réel, même si au quotidien nos comportements justifient cette relation de cause à effet, cela ne veut pas dire que nous vivons d’une façon optimale ce que sont nos facultés et surtout nos capacités. Cette mise en demeure de soi à de fortes répercussions sur notre façon d’entrevoir la réalité. La plus importante est que tout ce qui nous entoure comme tout ce que nous sommes n’est qu’apparence, mais attention cela ne veut pas dire que cela ne soit pas réel, simplement que cela est sans consistance c’est-à-dire sans substance.
Pourtant l’expérience de nous-mêmes comme l’expérience de notre environnement provoque bien en retour des sensations et des sentiments bien concrets ? En apparence seulement, car ce qui est réel ne dépend que du pouvoir d’une conscience à refléter ce qui semble identique à son état du moment. C’est donc à une désynchronisation temporelle et spatiale, entre l’apparition d’un objet et son observation que nous devons l’expérience de ce qui est inconscient à notre conscience et fait des médiums des sens les instruments de production des réalités sensibles. C’est ainsi que nous nous fabriquons une interprétation de nous-mêmes, de nos expériences et de notre environnement. Alors à qui devons-nous cela ? À notre connectome, terme qui qualifie la capacité de notre système nerveux à se rendre plastique aux différentes connexions nerveuses possibles et dont nos schémas cérébraux de compréhension des comportements de toute nature élaborent des représentations. Mais existe-t-il une possibilité de ne pas s’illusionner sur la réalité de nos perceptions ? Oui et cela passe par le rôle joué par la vitesse d’acquisition de nos perceptions.
Mais avant d’aller plus loin posons-nous cette question, existe-t-il une raison à ce que cela se comporte ainsi ? La réponse est oui, car elle se trouve dans la question. En effet c’est le seul moyen pour faire advenir les conditions de création d’une faculté rationnelle, celle qui nous procure un sens à l’existence, par la mise en disposition des moyens d’un langage abstrait de reconstruction de la réalité. Nous verrons ultérieurement pourquoi ce langage est nécessairement abstrait et pourquoi cela est un langage. Ce qui nous intéresse maintenant, c’est le rapprochement avec les notions d’espace et son corolaire médiatique, la distance et celle de temps et son corolaire médiatique, la vitesse. Si la perception illusoire est due à ce qui apparait réel à nos sens mais ne l’est pas, c’est pour la simple raison qu’une dimensionnalité de l’espace et du temps nécessaire, ne peut être apportée que par l’existence d’une désynchronisation de cet espace-temps, qui en apporte les conditions d’apparition indépendantes de notre perception. En effet pas de perception d’espace-temps quand le sujet et son objet d’observation occupent un même espace-temps, car alors nous avons une fusion de deux espaces-temps, celui de l’objet et celui du sujet de la perception, ce qui rend caduque tout bénéfice de l’expérience, donc d’un avènement de conscience. Voilà comment la nature peut être amenée à manifester les moyens d’établir un développement conscient : créer une relation d’indépendance entre le temps générateur des conditions d’un espace, qui à son tour conditionne une réalité d’un temps. Tout cela n’est profitable, en vérité, que pour une conscience qui se dote ainsi des moyens d’une expansion de connaissances.
Pour répondre à la question de savoir s’il est possible de sortir de l’illusion, nous voyons que l’espace et le temps sont les deux conditions de l’existence de cette illusion. Logiquement il ne reste plus qu’à s’abstraire de leurs mécaniques d’apparition pour sortir de l’illusion. Et c’est ce que fait la conscience, en les intégrant dans sa réalité au court d’une relation d’indépendance avec un environnement, mais existe-t-il un support physique à cela ? Oui, le génome organique qui permet de réaliser une capacité d’expression qui conditionne l’exercice d’une modulation sur l’architecture organique, et in fine sur l’architecture cérébrale du connectome nerveux ce qui rend compte d’un organigramme fonctionnel d’un corps. Le fonctionnement d’intégration des différents espaces et des différents temps offerts par le développement de la conscience, lui-même issu des expériences de soi dans un environnement, apporte sous la forme d’un langage rationnel, une gouvernance d’un fonctionnement humain. Celui-ci permet d’allier dynamique vitale (par les fonctions organiques) et dynamique cognitive (par la fonction de symbolisation), ce qui donne un rétro-contrôle sur les plasticités du génome biologique et du connectome cérébral.
Alors la réponse est simple, sortir de l’illusion des apparences nécessite de se détacher des moyens de cette illusion, le temps et l’espace, car ils sont conditionnés par des contextes d’une inconscience de soi et de l’environnement, qui sont relatifs à notre degré de maturité perceptive. Mais se détacher des contextes ne signifie pas que l’on en perde l’ensemble des atouts qu’ils comportent, mais permet d’en apprécier beaucoup plus objectivement les éléments de leurs constitutions, par les corrélations que l’on peut percevoir. C’est ainsi que l’intégration des espaces et des temps relatifs à toutes perceptions, permet à la conscience de reconstituer un propre espace-temps d’autant plus objectif qu’il sera issu d’un langage rationnel. Pour ce faire, il lui suffit d’envisager un processus de plasticité morphologique, dont le moteur en sera l’articulation entre une énergie d’expansion dominée par une compréhension cognitive, et une énergie de concertation dominée par la conjonction physiologique des fonctions organiques d’un corps. Ce processus morphologique régit donc un fonctionnement individuel par le biais des informations innées et acquises.
Ce que fait réaliser cette prise de conscience, c’est que le développement et la croissance d’un corps physique ne doit rien au hasard. La conséquence immédiate qu’il nous vient à l’esprit, c’est que la conscience est le véritable récipiendaire d’un développement vital. Alors tout ce qui a de la vie, c’est-à-dire tout espace en mouvement de temps qui manifeste une transformation par l’observation d’une croissance tant spatiale (par des dimensions), que temporelle (par de l’information), représente par l’existence d’un corps, la partie visible d’une conscience en développement. Cela veut dire que dans notre monde, tout ce qui évolue apparait tôt ou tard et manifeste une présence à notre conscience, alors que tout ce qui involue disparait et meurt à notre conscience. La relation de réciprocité, c’est-à-dire l’échange, est donc plus la marque du vivant plutôt que la relation de cause à effet. Ceci implique donc une physique de puissance, une croissance, pour interpréter la réalité plutôt qu’une physique de défiance, une compétition.
Si nous accordons à la conscience la possibilité d’être motrice du devenir d’un être humain, alors nous dotons celui-ci d’une capacité de connaissance qui le situe au-delà des paradoxes spatiaux-temporaux. En effet par son propre espace-temps, un être humain peut faire évoluer la cohérence de son organisation d’une façon indépendante grâce aux informations qu’il perçoit de lui-même, ce qui motive automatiquement la cohérence de son organisation et de celle de son environnement par le fait de la mutualisation de leurs moyens de communication et l’indépendance de leurs organisations. Il y a donc maintient d’une cohérence bilatérale au cours du seul développement évolutif. Si cette lecture de la réalité physique semble si pertinente, c’est parce que nous constatons une certaine similitude qui apparait entre les comportements quantiques et relativistes des différents objets de la réalité, et ce que réalise un fonctionnement humain par son corps physique et ceci grâce à ses états de conscience.
Ainsi voilà en quoi une présence manifeste bien plus qu’une occupation d’espace dans un temps donné. L’ensemble du processus intégré d’un être humain, manifeste une conscience de par les valeurs que manifeste son fonctionnement propre, mais ce qu’il représente en premier est le résultat d’une puissance matérielle informée.