L’instant symbolise le temps réel vécu dans l’interaction individuelle entre les membres d’une même espèce. Pour l’être humain, l’instant est le moment vécu de l’interaction entre ce qu’il est, et l’autre être humain qui fait strictement de même. Une personne seule ne vie que la projection de son esprit, dans ce que chaque idéation du vécu lui confère comme moyen d’identification à elle-même. Tant que nous n’acceptons pas le fait d’une réalité perçue au nom de la manière dont nous l’appréhendons, nous ne comprenons pas la notion de temps réel. Le temps réel est la confrontation entre deux niveaux de conscience, dont l’efficience ne se réalise que dans l’interaction avec un semblable. Encore une fois la réalité ne s’éprouve que dans le rapport à l’autre, comme l’autre fait de même avec nous. C’est pour cela que la réalité n’existe pas en soi mais résulte d’un fonctionnement, qui à chaque instant se conçoit comme le contexte partagé d’une existence commune. Les sciences physiques nous délivrent un monde qui n’est que le fruit de l’imaginaire des nombreux scientifiques à vouloir concevoir une compréhension d’un univers commun, qui dans le temps réel de chacun ne représente qu’un environnement purement abstrait mais commode à l’activité de l’esprit. Accepter que rien n’existe en dehors de la projection imaginaire de chacun est un défi pour l’esprit, que chacun peut relever s’il souhaite connaître la réalité de son existence.
C’est très inconfortable d’imaginer que le monde n’existe pas, surtout quand nos sens nous démontre, par le plaisir ou la douleur, qu’il est bien réel à notre corps et à notre esprit. Mais c’est une pure illusion qui ne cherche qu’à sauvegarder cette zone de confort où chaque personne peut s’accommoder de son existence, dans sa pauvreté comme dans sa richesse. Nul nihilisme en la matière, chacun de nous existons bel et bien, mais pas comme le laisse subodorer les organisations sociales, qui depuis notre tendre enfance nous bercent dans l’illusion d’une conquête réalisatrice d’une personnalité ayant fait les bons choix par l’investissement d’un courage nécessaire à sa réalisation. Tout cela n’est que mensonge à soi-même, tant que chaque personne ne veut pas prendre en considération le fait que son cœur batte autrement que pour jouir d’une vie par procuration, ce que sa conscience réfute avec l’âge à condition qu’elle y prête attention. Personne ne se méfie de l’histoire, celle que l’on enseigne et à laquelle on souscrit depuis que l’on est conscient des causes à l’origine d’une vie.
Pourtant rien n’est réel au sens stricte du terme, en dehors des scénarios générés par notre cerveau, car pour que cette réalité prenne corps il faudrait sortir de ce corps et accepter une dimension métaphysique qui ne soit autre que la dimension humaine qui fait défaut au plus grand nombre, un non-attachement à soi. Investir dans l’intérêt général, c’est avant tout reconnaître un intérêt supérieur de soi-même qui soit en dehors de soi sans être différent de soi, mais supérieur à l’idée que l’on se fait de soi. En fait un soi intégral qui n’est autre que l’intérêt général qui prend corps sous la forme de l’être humain se réalisant par l’intégration de son espèce, un destin d’Homme. Nous sommes ici au cœur de la reconnaissance d’un complexe mémoriel de l’espèce humaine, qui n’est autre que ce qu’un génome transmet à sa descendance, une potentialité d’Homme, ce soi intégral dont la conscience n’est pas individuelle mais personnelle, au point d’incarner la position de l’Homme dans l’espace d’une création universelle.
Tant que nous sommes dans l’ère de l’humain nous sommes dans les rapports de forces ou dans des rapports de coopération, seul le choix donné par le niveau de conscience de chacun permet d’observer dans quel camp chacun se situe. Pourquoi donc vouloir concevoir des sociétés dont les seules règles républicaines sont de satisfaire à des valeurs impraticables dans un contexte de compétition interindividuelle, où seule compte la réalité du mieux adapté à une Histoire fabriquée de toute pièce par les vainqueurs du passé. Ce confort n’a pas de sens pour le plus grand nombre mais semble justifier la réussite d’un petit nombre, nous naviguons en pleine tautologie historique, ce sens évolutif est perçu maladroitement comme juste puisque seul un petit nombre semble refléter ce pourquoi il existe une compétition dans le plus grand nombre pour l’accession au pouvoir d’un petit nombre. Bien sûr cela est totalement erroné, puisque ce qui fait la marque d’une espèce est le niveau de conscience native qui lui permet d’envisager les possibilités d’expression d’un imaginaire commun. Ceci n’exige en rien la venue d’une compétition envers les moyens d’expression, mais plutôt une reconnaissance des moyens nécessaires à l’expression et la réalisation de chacun.
Le langage d’une espèce ne propose que les moyens d’une compréhension de chacun par tous et inversement, car ce que nous avons en commun est le niveau de conscience alloué à notre forme humaine, ce qui fait de l’Homme le bien commun de tous. Ce qui se joue aujourd’hui n’est que le choix entre chacun, de vouloir intégrer son espèce pour participer à l’avènement de ce bien commun et faire franchir à l’Homme les frontières de sa mémoire d’espèce. L’autre choix serait de renforcer le pouvoir de différenciation entre les uns et les autres, ce qui à terme ne peut mener qu’à la destruction de l’espèce faute de mémoire commune. C’est donc à chacun de décider, et pour alimenter cette réflexion, la notion de temps réel doit être approfondie pour installer les marqueurs d’une compréhension plus approfondie de ce dans quoi chacun dans son quotidien, participe de son intérêt existentiel.
Si d’un autre coté nous cédons notre existence par respect d’une autre que la sienne, alors ce dont nous sommes conscient ne sert à rien si ce n’est nous donner la raison de ce pourquoi à cet instant précis, nous devrions disparaître. Cette erreur de jugement vient de notre esprit à confondre ce qui relève du temps réel de notre esprit à prendre conscience d’une chose, et du moment d’un vécu ou le temps joue le rôle d’un agenda de notre vie. Le temps du vécu n’est pas le temps de la conscience, car le temps du vécu n’est que la projection de l’ignorance d’un temps de la conscience, nécessaire à la compréhension de ce que l’on est au moment où l’on prend conscience que l’on représente quelqu’un dans la situation que l’on est en train de vivre. Cette ignorance ne doit pas être confondue avec l’impertinence de sa présence dans ce moment, mais avec l’incapacité du souvenir de ce pourquoi nous sommes là et pas ailleurs, juste l’incapacité de reconnaître la cause de notre présence à ce moment précis. Le conflit n’existe que dans le maintien de cette ignorance, mais dans le cas contraire le comportement de la coopération l’emporte sur tout désir de puissance, ce qui ne peut qu’aller dans le sens de la satisfaction à un intérêt général pour le partage de l’espace d’une vie commune.
Nous le voyons, le temps réel est en fait un temps de conscience partagée dont les frontières ne dépendent que du niveau de connaissance des protagonistes dans la situation d’un même vécu. Si le temps est alloué à la conscience, il ne peut pas être l’outil d’un vécu sauf à être instrumentalisé par plus conscient que soi. N’allons pas chercher plus loin l’origine du temps d’horloge, dont il ne faut pas confondre l’utilité sociale, avec les éléments naturels qui lui on permit d’émerger, tel que les cycles solaires et lunaires.
Tout commence avec ce que nous pensons être la réalité. Ce cadre général de l’existence ne doit sa nature ordinaire que du choix d’utiliser les résultats des sens pour définir les catégories spatiales de la réalité. Celle-ci n’est alors entrevue qu’au travers des différents prismes d’une géométrisation par l’esprit et dont l’échelle va du microscopique au macroscopique, du nanoscopique à l’astronomique. Comment dans ces conditions ne pas établir un formalisme mathématique dont les œuvres opératoires sont capables de formulations, tant abstraites que concrètes, ne dépendant pour leurs réalités que de la mesure et du calcul. Se servir d’un mode projectif pour la connaissance et la compréhension de la réalité est un leurre de l’esprit, car la seule chose que l’on peut obtenir c’est un savoir sur le monde des sens dont la mesure ne peut être qu’incertaine, puisque ce monde n’est qu’une projection mentale individuelle dotée d’aucun fond. Certes, les outils de la statistique et des probabilités peuvent en donner une certaine vision, ce au travers des résultats dont chacun peut soustraire un accord commun, une science commune. Mais in fine, il s’agit toujours d’une interprétation plus ou moins acceptable de l’approche d’un réel à jamais inaccessible.
La réalité ce n’est pas cela, c’est avant tout un monde issu de l’esprit, non par projection ni analyse, mais par émergence des formes qui le compose. Si chacun de nous sommes amenés à ne plus percevoir par nos sens mais par notre esprit, c’est parce que nous partageons déjà une réalité commune au travers des émergences de formes, dont le principe objectif d’individualité complémentarise parfaitement le principe subjectif de personnalité. Dans la réalité l’espace n’est plus un obstacle, car il n’y a plus de dimensions géométriques. Seules existent les relations qui font apparaitre ce qui relève d’un temps réel, les synchronisations de conscience. Nous sommes alors dans une réalité où le niveau de l’esprit qualifie la richesse de relation entre soi et les différents êtres de l’existence. Cela semble surprenant et étonnant de penser ainsi, mais l’abandon de l’individualité spatiale est la seule porte d’entrée à la communication sans les entraves de sens et de forme, entre tout être apparaissant dans une existence.
Cette communication est dotée d’une morphologie télépathique car la synchronisation des relations qui la permette, n’est définie que par le niveau de conscience des personnes en jeu. Ce qui est pour nous difficile à accepter dès lors que nous restons dans la perception sensorielle, c’est que la réalité puisse nous parler. En effet la communication télépathique est une autre façon de décrire le sens spontané d’une situation où il semble que la réalité que nous percevons nous parle. C’est ce constat simple et direct qui nous permet de savoir au fond de notre conscience, que chaque être de l’existence est une partie de la chaire de celle-ci et c’est cette mémoire que nous devons restaurer par le souvenir. Si nous franchissons le seuil de la réalité de l’esprit, car rappelons-le ceci est un choix individuel, alors nous devons abandonner la description d’une réalité des sens dont seules les catégories de l’inconscient, du subconscient et du conscient en assurent l’architecture fonctionnelle. Vivre dans un temps réel, c’est vivre dans l’esprit de chacun la réalité d’une existence partagée, dont le degré de conscience n’est que le niveau d’établissement de cette réalité par les relations des êtres qui la constitue. Le temps, c’est-à-dire l’identité que nous attribuons à sa définition, est bien la clé qui permet d’ouvrir la porte d’une réalité de l’esprit dont seule une maturité perceptive en rapporte la qualité existentielle.